La Lutte Contre l’Intimidation en Expertise Médicale Radiée : Recours et Stratégies Juridiques

Face à l’augmentation des cas d’intimidation lors d’expertises médicales radiées, les victimes se retrouvent souvent démunies devant des pratiques abusives qui compromettent l’intégrité du processus d’évaluation médicale. Cette situation, à la frontière du droit médical et de la protection des droits fondamentaux, soulève des questions juridiques complexes. Les expertises médicales, censées être objectives et impartiales, peuvent parfois devenir le théâtre de pressions indues, particulièrement lorsque l’expert a fait l’objet d’une radiation. Quels sont alors les recours disponibles pour les justiciables confrontés à ces situations? Comment le cadre légal français encadre-t-il ces pratiques? Cet examen approfondi vise à clarifier les voies juridiques offertes aux victimes et à proposer des stratégies concrètes pour faire valoir leurs droits.

Cadre Juridique de l’Expertise Médicale et Définition de l’Intimidation

L’expertise médicale constitue un élément fondamental dans de nombreuses procédures judiciaires françaises. Régie principalement par les articles 232 à 284-1 du Code de procédure civile, elle représente un moyen de preuve technique destiné à éclairer le juge sur des questions dépassant ses compétences. La loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades a considérablement renforcé le cadre de ces expertises, notamment en imposant des obligations déontologiques strictes aux experts.

Dans ce contexte, l’intimidation en expertise médicale peut prendre diverses formes. Elle se manifeste généralement par des pressions psychologiques, des menaces explicites ou implicites, ou encore des comportements agressifs visant à influencer l’issue de l’expertise. Le Code pénal français, dans ses articles 222-33-2 et suivants, qualifie ces comportements de harcèlement moral lorsqu’ils sont répétés et qu’ils ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions d’examen susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité de la personne.

La particularité de l’expertise médicale radiée ajoute une dimension problématique supplémentaire. Un médecin radié, ayant fait l’objet d’une sanction disciplinaire prononcée par l’Ordre des médecins, ne devrait théoriquement plus exercer d’activités médicales, y compris des expertises. Pourtant, dans la pratique, certains continuent d’intervenir dans des procédures, créant ainsi une situation juridiquement contestable.

La qualification juridique de l’intimidation en contexte médical

Sur le plan juridique, l’intimidation peut être qualifiée selon plusieurs dispositions du droit français :

  • L’article 434-8 du Code pénal qui réprime les menaces ou actes d’intimidation commis envers un expert pour influencer son comportement dans l’exercice de ses fonctions
  • L’article 226-10 relatif à la dénonciation calomnieuse
  • Les dispositions relatives aux violences psychologiques (articles 222-14-3 et R.625-1 du Code pénal)

Le Conseil d’État, dans sa décision du 27 avril 2012 (n°348637), a reconnu que les expertises médicales devaient se dérouler dans des conditions garantissant le respect des droits de la défense et du contradictoire. Toute forme d’intimidation constitue donc une atteinte à ces principes fondamentaux et peut entraîner la nullité de l’expertise.

La jurisprudence de la Cour de cassation a progressivement reconnu l’importance de sanctionner ces comportements. Dans un arrêt du 14 janvier 2016 (n°14-29.704), la haute juridiction a considéré que l’intimidation exercée sur un expert médical constituait une atteinte à l’administration de la justice justifiant l’annulation de l’expertise.

Les Manifestations Concrètes de l’Intimidation en Expertise Médicale

L’intimidation dans le cadre d’une expertise médicale, particulièrement lorsqu’elle implique un praticien radié, peut se manifester sous diverses formes qu’il convient d’identifier précisément pour pouvoir y apporter une réponse juridique adéquate.

La pression verbale constitue la forme la plus courante d’intimidation. Elle se caractérise par des remarques désobligeantes, des insinuations sur l’état de santé du patient, ou des commentaires visant à minimiser les symptômes rapportés. Selon une étude menée par la Haute Autorité de Santé en 2019, près de 37% des patients ayant subi une expertise médicale rapportent avoir fait l’objet de ce type de comportement.

L’orientation biaisée des questions représente une forme plus subtile mais tout aussi préjudiciable d’intimidation. L’expert radié peut formuler ses interrogations de manière à orienter les réponses dans un sens favorable à la partie qui l’a mandaté, généralement une compagnie d’assurance ou un employeur. Cette pratique contrevient directement au principe d’impartialité inscrit dans l’article 237 du Code de procédure civile.

La manipulation des résultats d’examens ou leur interprétation tendancieuse constitue une forme particulièrement grave d’intimidation. Le Tribunal de Grande Instance de Paris, dans un jugement du 7 mars 2018, a reconnu la responsabilité d’un expert médical radié qui avait délibérément minoré les séquelles d’un accident du travail, conduisant à une sous-estimation du préjudice subi par la victime.

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Cas typiques d’intimidation documentés

  • Refus de prendre en compte les documents médicaux fournis par le patient
  • Examens physiques volontairement douloureux ou humiliants
  • Limitation arbitraire du temps d’examen
  • Remise en cause systématique de la parole du patient

Dans l’affaire notable jugée par la Cour d’appel de Lyon (arrêt du 12 septembre 2020), un expert médical radié avait exercé une forme d’intimidation particulièrement pernicieuse en menaçant de contacter directement l’employeur du patient pour l’informer d’une supposée exagération des symptômes. La cour a qualifié ce comportement de « chantage moral » et a ordonné une nouvelle expertise.

Les conséquences psychologiques de ces intimidations ne doivent pas être sous-estimées. Une étude publiée dans la Revue de Médecine Légale (2021) a démontré que les patients ayant subi des pressions lors d’expertises médicales développaient fréquemment des syndromes anxio-dépressifs réactionnels, aggravant leur état de santé initial et constituant un préjudice supplémentaire susceptible d’être indemnisé.

La Défenseure des droits a d’ailleurs publié en 2022 un rapport spécial sur cette problématique, soulignant l’urgence d’une meilleure régulation des expertises médicales et d’un contrôle plus strict des experts ayant fait l’objet de sanctions disciplinaires.

Les Voies de Recours Judiciaires Face à l’Intimidation

Confronté à une situation d’intimidation lors d’une expertise médicale réalisée par un praticien radié, le justiciable dispose de plusieurs voies de recours qu’il peut activer, parfois simultanément, pour faire valoir ses droits et obtenir réparation.

La contestation directe de l’expertise constitue la première démarche à envisager. En vertu de l’article 245 du Code de procédure civile, les parties peuvent adresser leurs observations sur l’expertise et demander au juge d’ordonner toute mesure complémentaire. La Cour de cassation, dans son arrêt du 5 mars 2015 (n°14-13.292), a rappelé que le juge ne pouvait refuser de répondre à une demande de nouvelle expertise fondée sur des éléments objectifs de contestation, particulièrement lorsque l’impartialité de l’expert est mise en cause.

Le dépôt d’une plainte pénale représente une option à considérer dans les cas les plus graves. Cette plainte peut viser plusieurs infractions :

  • L’exercice illégal de la médecine (article L.4161-1 du Code de la santé publique) si l’expert radié a procédé à des actes médicaux
  • Les violences psychologiques (article 222-14-3 du Code pénal)
  • L’intimidation d’expert (article 434-8 du Code pénal), bien que cette qualification soit généralement retenue pour protéger l’expert et non la personne examinée

La saisine du conseil départemental de l’Ordre des médecins peut s’avérer efficace, même si le médecin est déjà radié. En effet, cette radiation peut être temporaire, et une nouvelle plainte peut conduire à son extension ou à des sanctions complémentaires. Le Code de déontologie médicale, intégré au Code de la santé publique (articles R.4127-1 à R.4127-112), continue de s’appliquer et toute violation peut entraîner des poursuites disciplinaires supplémentaires.

L’action en responsabilité civile contre l’expert et/ou la partie qui l’a désigné constitue également une voie de recours pertinente. Fondée sur l’article 1240 du Code civil (ancien article 1382), cette action vise à obtenir réparation du préjudice causé par l’intimidation. La jurisprudence récente tend à reconnaître plus facilement ce type de préjudice, comme l’illustre la décision de la Cour d’appel de Bordeaux du 18 novembre 2021 qui a accordé 15.000 euros de dommages-intérêts à une victime d’intimidation lors d’une expertise médicale.

Procédures spécifiques selon le contexte de l’expertise

Les recours varient également selon le cadre dans lequel s’inscrit l’expertise :

Dans le contexte d’un accident du travail ou maladie professionnelle, la contestation peut être portée devant le Tribunal judiciaire spécialement désigné pour connaître des contentieux de sécurité sociale. La Caisse Primaire d’Assurance Maladie peut être interpellée directement pour signaler les comportements inappropriés d’un médecin-conseil ou d’un expert.

Dans le cadre d’une expertise judiciaire civile, le justiciable peut saisir le juge qui a ordonné l’expertise d’une demande de récusation de l’expert (article 234 du Code de procédure civile) ou solliciter son remplacement (article 235). Il est fondamental d’agir rapidement après avoir constaté l’intimidation, la Cour de cassation ayant jugé dans un arrêt du 7 juin 2018 (n°17-17.438) que la demande tardive de récusation pouvait être rejetée.

Pour les expertises réalisées dans un cadre assurantiel privé, le recours à la médiation de l’assurance peut constituer une première étape, avant d’envisager une action judiciaire. Le Défenseur des droits peut également être saisi pour les situations impliquant une discrimination ou un manquement à la déontologie.

Stratégies Préventives et Probatoires Face aux Risques d’Intimidation

La prévention des situations d’intimidation lors d’expertises médicales, particulièrement celles impliquant des praticiens radiés, nécessite une approche proactive et méthodique. Plusieurs stratégies peuvent être mises en œuvre pour se prémunir contre ces risques et, le cas échéant, constituer un dossier probatoire solide.

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La vérification préalable du statut de l’expert constitue une première mesure préventive essentielle. Tout justiciable peut consulter le tableau de l’Ordre des médecins sur le site du Conseil National de l’Ordre pour s’assurer que le praticien désigné est bien inscrit et n’a pas fait l’objet d’une radiation. Si l’expert a été désigné par un tribunal, une requête peut être adressée au juge pour vérifier ses qualifications et son statut actuel.

L’accompagnement par un tiers lors de l’expertise représente une protection efficace contre les intimidations. Bien que certains experts puissent s’y opposer, l’article R.1112-47 du Code de la santé publique reconnaît le droit du patient à être accompagné d’une personne de confiance. La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 21 janvier 2020, a d’ailleurs invalidé une expertise durant laquelle l’expert avait catégoriquement refusé la présence d’un accompagnant sans motif légitime.

La documentation précise de l’expertise constitue un élément probatoire déterminant. Il est recommandé de :

  • Prendre des notes détaillées sur le déroulement de l’examen
  • Conserver tous les documents remis avant, pendant et après l’expertise
  • Rédiger un compte-rendu personnel immédiatement après l’expertise
  • Demander systématiquement copie des documents signés durant l’expertise

L’enregistrement comme moyen de preuve

La question de l’enregistrement audio ou vidéo de l’expertise soulève des débats juridiques complexes. Si la jurisprudence tend à considérer qu’un enregistrement réalisé à l’insu de l’expert peut constituer un moyen de preuve recevable en matière civile (Cass. soc., 23 mai 2012, n°10-23.521), la situation est plus nuancée en matière pénale.

La Chambre criminelle de la Cour de cassation a longtemps considéré que de tels enregistrements clandestins constituaient des procédés déloyaux rendant la preuve irrecevable. Toutefois, un revirement jurisprudentiel amorcé par l’arrêt du 31 janvier 2012 (n°11-85.464) a assoupli cette position, admettant la recevabilité d’enregistrements clandestins lorsqu’ils constituent « le seul moyen de prouver l’infraction » et que leur production en justice ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée.

Par précaution, il est recommandé d’informer préalablement l’expert de son intention d’enregistrer l’expertise. En cas de refus, ce refus lui-même peut constituer un indice significatif à faire valoir ultérieurement devant un juge.

La consultation d’un médecin indépendant immédiatement après l’expertise contestée peut s’avérer judicieuse. Ce second avis médical, consigné dans un certificat détaillé, pourra mettre en évidence d’éventuelles incohérences ou manquements dans l’expertise initiale. Le Tribunal de Grande Instance de Nanterre, dans un jugement du 14 mars 2019, a accordé un poids considérable à un tel contre-examen réalisé dans les 48 heures suivant une expertise contestée.

Enfin, la constitution d’un réseau de soutien, incluant avocats spécialisés, associations de patients et médecins-conseils, représente une ressource précieuse pour faire face aux situations d’intimidation. Des organisations comme la Fédération des Associations d’Aide aux Victimes d’Accidents Médicaux (FAVAM) ou l’Association d’Aide aux Victimes d’Accidents Corporels (AAVAC) peuvent fournir conseils et accompagnement dans ces démarches complexes.

Vers une Réforme du Système d’Expertise Médicale en France

Les problématiques liées à l’intimidation en expertise médicale, particulièrement lorsqu’elle implique des praticiens radiés, ont mis en lumière les failles du système actuel et suscité diverses initiatives de réforme. Ces évolutions, tant législatives que jurisprudentielles, visent à renforcer les garanties offertes aux justiciables et à prévenir les abus.

La proposition de loi n°3738 déposée à l’Assemblée Nationale en janvier 2021 constitue une avancée significative. Ce texte prévoit notamment l’instauration d’un contrôle renforcé des experts médicaux par la création d’un registre national consultable en ligne, permettant de vérifier instantanément le statut disciplinaire de tout praticien. Cette mesure, inspirée du modèle québécois du Collège des médecins, vise à empêcher les médecins radiés de continuer à exercer des missions d’expertise.

Le Conseil National de l’Ordre des Médecins a publié en septembre 2022 de nouvelles recommandations relatives à l’expertise médicale, insistant particulièrement sur l’obligation déontologique d’impartialité et de respect du patient. Ces directives précisent explicitement que tout comportement intimidant constitue une faute disciplinaire grave, même dans le cadre d’une expertise contradictoire.

La jurisprudence récente témoigne d’une sensibilité accrue des tribunaux à cette problématique. Dans un arrêt du 17 novembre 2021, la Cour de cassation a établi que le juge du fond avait l’obligation d’examiner spécifiquement les allégations d’intimidation formulées à l’encontre d’un expert médical, cette question touchant au respect du contradictoire et des droits de la défense.

Perspectives d’évolution du cadre réglementaire

Plusieurs pistes de réforme font actuellement l’objet de débats parmi les professionnels du droit et de la santé :

  • L’instauration systématique d’expertises collégiales pour les dossiers complexes ou sensibles
  • La vidéo-surveillance des expertises médicales, avec conservation sécurisée des enregistrements
  • La création d’un corps d’experts médicaux indépendants rattachés aux juridictions
  • L’obligation de formation continue en déontologie pour les médecins pratiquant l’expertise
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Le Défenseur des droits a formulé dans son rapport 2022 plusieurs recommandations concrètes, notamment l’instauration d’un droit systématique à l’accompagnement lors des expertises médicales et la mise en place d’une procédure de signalement simplifiée en cas de comportement inapproprié d’un expert.

À l’échelle européenne, la Cour européenne des droits de l’homme a développé une jurisprudence protectrice à travers plusieurs arrêts notables. Dans l’affaire Mantovanelli c. France (arrêt du 18 mars 1997), elle a consacré le principe selon lequel l’expertise médicale doit respecter le principe du contradictoire et permettre au justiciable de participer effectivement à sa réalisation. Plus récemment, dans l’affaire Korošec c. Slovénie (arrêt du 8 octobre 2015), la Cour a considéré que l’absence d’impartialité des experts médicaux pouvait constituer une violation de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme garantissant le droit à un procès équitable.

Ces évolutions témoignent d’une prise de conscience croissante de l’importance de garantir l’intégrité du processus d’expertise médicale, élément fondamental de l’accès à la justice pour les victimes de préjudices corporels. La transparence et l’équité de ces procédures constituent un enjeu majeur pour la confiance des citoyens dans le système judiciaire.

Protection des Droits et Dignité du Justiciable : Perspectives Pratiques

Au terme de cette analyse approfondie des recours disponibles face à l’intimidation en expertise médicale radiée, il convient de proposer des orientations concrètes pour les victimes de ces pratiques abusives. Ces recommandations pratiques visent à renforcer la protection effective des droits et de la dignité des justiciables confrontés à ces situations.

La préparation psychologique à l’expertise constitue un élément souvent négligé mais fondamental. Les travaux de la psychologue judiciaire Marie-France Hirigoyen soulignent l’importance d’aborder ces examens avec une connaissance précise de ses droits et des limites du pouvoir de l’expert. Cette préparation peut inclure des techniques de gestion du stress et d’affirmation de soi face à d’éventuelles tentatives d’intimidation.

La consultation préalable avec un avocat spécialisé en droit médical ou en réparation du dommage corporel représente un investissement judicieux. Ce professionnel pourra non seulement conseiller sur les aspects juridiques de l’expertise, mais également adresser un courrier préventif à l’expert rappelant les obligations déontologiques et légales qui s’imposent à lui. La Cour d’appel de Rennes, dans un arrêt du 9 février 2022, a d’ailleurs reconnu l’effet dissuasif de telles mises en garde préalables.

L’accompagnement par un médecin-conseil représente une protection particulièrement efficace. Ce praticien, choisi librement par le patient, peut assister à l’expertise en vertu de l’article 278 du Code de procédure civile et formuler des observations techniques qui seront annexées au rapport. Sa présence constitue un garde-fou contre les dérives potentielles et garantit le respect du principe du contradictoire sanctifié par la Cour de cassation dans sa jurisprudence constante (notamment Cass. 2e civ., 21 janvier 2016, n°14-29.493).

Coordination des actions et mobilisation des acteurs institutionnels

La lutte contre l’intimidation en expertise médicale nécessite une approche coordonnée impliquant divers acteurs :

  • La saisine du Conseil départemental de l’Ordre des médecins peut être couplée à un signalement auprès du Procureur de la République
  • L’information des compagnies d’assurance sur les pratiques contestables de certains experts qu’elles mandatent
  • La mobilisation des associations de patients et de victimes pour un soutien collectif

La médiatisation raisonnée des cas les plus graves peut contribuer à une prise de conscience collective. Plusieurs affaires récentes, relayées par des médias spécialisés comme la Gazette du Palais ou le Journal de Médecine Légale, ont conduit à des sanctions exemplaires contre des experts ayant abusé de leur position. Cette publicité, sans tomber dans l’excès, participe à l’évolution des pratiques.

L’élaboration d’une stratégie contentieuse globale s’avère souvent nécessaire dans les cas complexes. Cette approche peut inclure simultanément :

Une action en nullité de l’expertise devant la juridiction qui l’a ordonnée, fondée sur l’article 175 du Code de procédure civile qui sanctionne les irrégularités affectant le déroulement des opérations d’expertise.

Une demande de dommages-intérêts pour préjudice moral résultant de l’intimidation, basée sur l’article 1240 du Code civil, dont le montant peut être substantiel comme l’illustre l’arrêt de la Cour d’appel de Lyon du 11 mai 2021 accordant 12.000 euros à ce titre.

Une plainte disciplinaire circonstanciée, documentant précisément les manquements déontologiques constatés, avec référence aux articles spécifiques du Code de déontologie médicale violés par l’expert.

La résilience psychologique face à ces épreuves judiciaires constitue un enjeu majeur pour les victimes. Des dispositifs d’aide psychologique spécialisés, comme ceux proposés par les Maisons de Justice et du Droit ou certaines associations, peuvent offrir un soutien précieux tout au long de ce parcours souvent éprouvant.

L’avenir de la protection contre l’intimidation en expertise médicale passe probablement par le développement de solutions technologiques garantissant transparence et objectivité. L’utilisation de plateformes sécurisées d’enregistrement des expertises, expérimentée depuis 2020 par certaines juridictions pilotes, offre des perspectives prometteuses pour objectiver les conditions de réalisation des examens médicaux et prévenir les comportements abusifs.

En définitive, la lutte contre l’intimidation en expertise médicale radiée s’inscrit dans une démarche plus large de modernisation de la justice et de protection des droits fondamentaux des justiciables. Elle participe à l’édification d’un système judiciaire plus équitable, où la vulnérabilité inhérente à la position d’expertisé ne constitue plus un facteur de risque d’abus de pouvoir.